rêves
parfois
tu voles comme un oiseau c’est grisant
tu pleures comme un veau c’est pitoyable
tu sauves des vies c’est incroyable
tu trébuches dans un escalier abrupt que tu dévales en hurlant
– variante tu tombes de vélo dans une descente vertigineuse –
curieusement cela ne fait pas mal du tout
ou bien tu marches avec une infinie précaution car ta tête
posée sur ton cou
– pourquoi l’a-t-on coupée cela n’est pas dit –
risque à tout moment de dégringoler
une autre fois – c’est très gênant –
tu n’oses pas ouvrir la bouche de peur que toutes tes dents
qui ne tiennent plus qu’à un fil s’échappent de ta bouche
très gênant aussi
lorsque tu es si horriblement en retard que tu sors dans la rue
nu.e comme au premier jour
ou quelquefois – mais c’est aussi inconfortable – en pyjama
il arrive que le poème que tu inventes soit si parfait
(mais cela peut être aussi le meuble que tu assembles
la bière que tu crées la musique que tu composes)
que tu te sens empli.e d’une joie sereine
parfois quelqu’un – un inconnu un familier –
te fait une caresse qui te conduit au bord d’une extase
qui reste toujours – c’est bien dommage – inassouvie
une nuit on t’a donné tous les résultats d’un examen de maths
au moment même où tu entrais dans la salle.
au lieu de bûcher tu as cherché durant un temps infini
à t’en débarrasser discrètement pour ne pas te faire pincer
parfois
c’est étonnant car née fille tu es garçon ou le contraire
tu exprimes avec une grande violence une colère noire
contre ton père contre ton boss contre ton psy ou contre ta vie
(cela peut-être contre les quatre à la fois)
les mots coulent de ta bouche comme un torrent furieux
et – c’est vraiment agaçant –
chacun semble atteint soudain d’une profonde surdité
et tu n’es pas davantage écouté.e par la si belle personne
– oh mon dieu mais c’est ta cousine c’est ton boucher c’est Sarkozy –
à laquelle tu déclares ton amour désespéré
à genoux
le plus souvent tu es dans des lieux dans lesquels tu n’as jamais mis les pieds
conversant savamment avec des inconnus
sur des sujets que tu ne connais pas
dans une langue que tu n’as pas apprise
et tout ce que tu vis pour la première fois tu en es sûr.e t’est parfaitement familier
comme si tu l’avais expérimenté déjà dans un autre temps
dans une autre vie dans la peau de quelqu’un d’autre qui est toi pourtant
tu te réveilles en sursaut ou en paix en larmes ou en souriant déçu.e ou content.e
tu hausses les épaules et tu penses à l’étrange monde qui tourne dans tes nuits
il n’est pas rare que tu ne te souviennes de rien du tout de ces rêves dans lesquels
tu voles comme un oiseau c’est grisant
tu pleures comme un veau c’est pitoyable
tu sauves des vies c’est incroyable
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